Le 21 décembre 2024 à 17h, nous revoilà sur la place de la Cale à Betton. On l’avait quitté le 3 février dernier avec une vingtaine de proches, on l’a retrouvé 11 mois plus tard avec une grosse cinquantaine de personnes dont 10 qui nous ont accompagnés de Paris à Betton.
Les larmes aux yeux, on embrasse nos parents. C’est la fin de ce périple en train et vélo en Eurasie !
Cet article sera le dernier du blog, alors faisons le bilan.

1) Des chiffres, des chiffres et encore des chiffres
Au total, sur ces 320 jours de voyage, on aura parcouru 36 600 km pour un aller retour France Japon sans aucun avion :
- 24 300 km en train et en bus principalement pour le trajet aller jusqu’en Ouzbékistan puis le trajet retour depuis le Japon
- 10 500 km à vélo parcourus en 158 étapes entre l’Ouzbékistan et le Japon
- 1 800 km de ferrys pour naviguer entre Chine, Corée du Sud, Japon et Russie orientale

En moyenne, une étape de vélo sur notre voyage, ça ressemble à ça : 65 km, 350 mètres de dénivelé positif et 4h et 20 minutes les fesses sur la selle pour une vitesse moyenne de 15 km/h.
Et même avec nos vélos chargés pesant chacun entre 40 et 50 kg, on a gravi 58 km de dénivelé positif soit près de 38 fois l’ascension du Mont Ventoux.
Ainsi, à la force de nos cuisses et de nos mollets, on a produit 68 kWh d’énergie primaire chacun. Ça représente la consommation d’énergie d’une voiture à essence classique pour parcourir 126 km, on en a fait 10 500. Et si on avait converti toute cette énergie musculaire en électricité avec une dynamo, ça représenterait 55 kWh d’électricité soit la consommation d’électricité de 9 jours d’un français moyen.
On a dormi 160 nuits en hôtel, 85 nuits en bivouac et 55 nuits chez l’habitant. Enfin, pour cuisiner, on a consommé 500 g de gaz en cartouche et 5 litres d’essence avec notre réchaud.
Mais tout ça, ce ne sont que des chiffres. Ça fait beau sur les réseaux sociaux et dans la presse mais ce n’est pas ce dont on se souviendra dans 10 ans.
Cela dit, vous retrouverez un fichier excel en libre accès avec tous ces chiffres si ça vous intéresse : Chiffres Rayons dOrient – Partage
2) Mais quelle aventure !
1 an sur les routes à vélo : ça change un homme, ça change une femme. Alors on sait qu’on a changé. Physiquement on a perdu 15 kg pour Quentin et 25 kg pour Lucile. Mais pour le reste, il est encore tôt pour faire état des différences entre les “nous de 2024” et les “nous de 2025”. On peut cependant vous partager quelques enseignements que nous tirons de ce long voyage.
a) D’abord les plus simples
- Voyager loin sans avion : c’est possible. Nous l’avons montré en chevauchant nos vélos mais aussi les bus et trains du continent. De nombreux autres exemples de voyages sans avions existent : en voilier, en stop, à pied, etc. Vous en retrouverez plein au sein de la fabuleuse communauté françaises de voyageurs bas-carbone nommé l’Alibi : https://www.facebook.com/groups/2816089065297957
- Voyager à vélo et sans avion : c’est trop bien. On a déjà voyagé en avion auparavant et honnêtement, jamais on a vécu une aventure aussi incroyable. Ca ajoute de la contrainte, et donc, pleins d’histoires de vie, de moments imprévus et la découverte de l’inconnu qui fait le voyage. C’est l’avenir du voyage et c’est un chouette avenir.
b) Puis les plus profonds
- La “sobriberté” existe vraiment. Avoir peu de possessions matérielles, se déplacer lentement ou encore vivre dans de petits espaces : toutes ces choses qui rebutent au premier abord, perçues comme des contraintes, ont pour nous été une incroyable source de liberté, de joie et d’échanges humains. Nous avons appelé ce sentiment : “sobriberté” et on espère vraiment que vous le vivrez un jour.
- Le monde est dégradé mais toujours beau et accueillant. +52°C au thermomètre au Vietnam, inondations, déchets plastiques partout, pénurie d’eau en Asie Centrale : la liste est longue quand il s’agit de constater la dégradation des conditions de vie sur Terre. Mais tout n’est pas perdu, la vie suffoque mais elle est toujours là : à nous de faire ce qu’il faut pour préserver ce qu’il reste. Les humains qui peuplent cette terre le mérite.
- L’homme est individuellement bon. Partout où nous sommes passés, il y avait des gens prêts à nous aider, à partager leur nourriture ou à ouvrir la porte de leur maison. C’est incroyable et ce n’est pas la première fois que nous l’avons vécu : en France, en Italie, etc. Ca fait un bien fou de se rappeler à quel point notre prochain est, par défaut, bienveillant à notre égard. Ça nous donne beaucoup d’espoir pour l’avenir.
- L’écologie est quasi-unanimement perçue comme positive et source d’avenir. En interviewant des locaux rencontrés sur le chemin et aux travers de discussions, nous nous sommes rendus compte que : 1) il existe un mot pour l’écologie dans toutes les langues et 2) ce mot est perçu positivement par toutes les personnes rencontrées. Certains nous ont bien sûr dit que ce n’était pas leur priorité mais personne ne nous a dit que c’était une bêtise monumentale comme on l’entend parfois dans la bouche des extra-terrestres français qu’on voit parfois à la télé, à la radio ou dans la presse.
c) Enfin, la transmission aux enfants

A notre retour, on a retrouvé les petits aventuriers de l’école Paul Gauguin à Saint-Aubin d’Aubigné (voir cet article ). Pendant un an, les élèves de 5 classes allant du CP au CM1 nous ont suivis au rythme d’un mail par semaine avec parfois des vidéos, des devinettes et des défis autour de l’écologie : faire la plus grande distance à vélo, ramasser le plus de déchets en 1H dans la ville, écrire un poème pour un ami, construire un hôtel à insectes, etc. Le dernier défi était simple, chacun devait réfléchir pendant les vacances de Noël au plus grand rêve de sa vie. Puis il devait l’écrire sur 2 papiers différents.
A notre arrivée à l’école, les enfants sont euphoriques, on ne s’est jamais sentis autant des stars. Ils ont des tonnes de questions auxquelles on répond avec plaisir. On passe dans les classes, ils nous montrent leurs réalisations de l’année et nous partagent leurs rêves : partir voyager à vélo jusqu’au Japon (tiens), devenir soigneur d’animaux, devenir footballeur professionnel ou encore devenir ramasseur de déchets ! Un des papiers est affiché dans la classe. On leur demande de mettre le deuxième vœu dans une enveloppe qu’ils ne rouvriront qu’à leur 18 ans. Notre rêve nous a porté, on espère que le leur les porteront aussi dans leur future vie d’adulte.

Avoir montré un peu de la réalité de ce monde aux quelques 80 enfants, les avoir fait rêvé sur fond d’écologie et ressentir leur énergie et leur imagination, c’est le plus bel héritage du voyage à nos yeux.
3) Comment se sent-on après un tel voyage ?
Comme pour nos articles “Pourquoi fait-on ce voyage ?”, on vous écrit chacun notre point de vue.

Quentin : plein et vide.
Je suis parti parce que je me sentais enfermé dans un mode de vie et une culture que je savais néfaste pour l’environnement et donc, notre avenir. Et j’ai découvert, ou plutôt effleurées, ces autres manières de vivre, ces sociétés dans laquelle la compétence supplante l’abondance. Ce faisant, j’ai aussi fait tellement de belles rencontres, vu de beaux paysages et profité de cette petite brise fraîche qui caresse le visage de tous cyclistes. S’agissant de la dégradation de notre monde, j’ai toujours peur mais j’ai plus d’espoir. Et puis, le plus précieux de tout, j’ai le sentiment d’avoir tant approfondi notre relation avec Lucile, de nous être soudés et d’avoir appris à mieux nous écouter.
En une phrase, je suis revenu à Betton avec l’impression d’avoir fait le plein.
Mais pour autant, sans que je puisse l’expliquer ou le décrire précisément, je me sens vide après un mois de retour en France. Chaque jour, pendant ce voyage, tout était nouveau : les paysages, parfois la langue, la culture et les rencontres. Chaque jour, c’était l’extase. Et le retour chez mes parents, c’est l’inverse : je retrouve des repères. Je retrouve ces choses établis depuis toujours : les relations avec mes proches, la nourriture ou encore le code de la route. J’ai changé mais je reviens dans ma vie d’avant, qui n’a pas changé. Il y a de quoi bouleverser.
Ce blues du voyageur me plonge dans la nostalgie et me coupe l’envie. Mais le blus précède souvent chez moi de grands changements : les projets ne manquent pas.
Lucile : Confiante et motivée
Pour ma part le retour est synonyme d’un nouveau départ. J’ai finalement pris la décision de ne pas revenir à mon précédent poste mais de me lancer dans un nouveau défi (entrepreneurial cette fois). Je ne me suis rarement sentie aussi en forme, aussi motivée et aussi pleine d’énergie ! Alors je profite de mon plus grand apprentissage du voyage : si je veux je peux (et même avec beaucoup de kilos en trop et trop peu d’entraînement), alors maintenant je fonce !
Il est impossible de faire un bilan exhaustif d’un tel voyage. Mais on espère que cet article vous aura intéressé et vous permettra de mieux vous préparer à votre propre voyage ou simplement d’entamer ou d’accompagner vos réflexions. Si vous avez des questions, le mieux est de nous envoyer un message sur Instagram.
Un énorme merci !
Un tel voyage ne se réalise jamais seul. Et l’expérience aurait été totalement différente sans toutes ces rencontres, ces coups de main, cet accueil et ces sourires. Alors nous tenons à remercier toutes les personnes qui nous ont aidées et soutenues dans ce voyage :
Christophe, Vincent, Mathias, le contrôleur du Lyon-Geneve, Marek, Maëlle, Grégory, Pao, Justine, Lena, Clémence, Levante, le contrôleur du Budapest – Bucarest, Boris, Paul, Igor, Eliana, Inga, Isa, Soso Delon, Artem, l’équipe de la gare d’Atyrau, Ulurbek, Claire-Lise, Samuel, Séverine, Mieles, Les employés d’UzTransGas (UTG), l’employé de la voirie de Qiziltepa, Fazli, Nurbek, Aïsha, Umzac, Dila, Rahim, Kari, Firzav, O’tkirbek, Ousmane, Sizin, Mojzib, le mécanicien de Novichomok, Oulourbek, Murad, François, Matlubaxon, Nurik, Guillaume, Victor, Nurievic, Intimak, Arnaud, Ruth, Hazima, Sultanbek, Dania, Djerda, Léa, Victor, Vladimir, Ulysse, Tilek, Léo, Ariane, Mathieu, Apolline, Benjamin, Solène, Hortense, Jules, Warren, Jakob, Ricardo, Sonia, Sultanali, François, Julia, Adrien, Claudia, Reuh, Ciara, Thiam, Huck, Denis, Lanoï, Maï, Estelle, Eva, Alicia, Khamsing, Deborah, Clothilde, Mickaël, les moines bouddhistes de Thaïlande, Samapon, le maire de Nong Phai, l’agricultrice de Nong Phai, Mika, dame de Dara Tree Hostel, le Gustrotter, Nut, Minh, Creamy, Manon, Flavien, américain de iOverlander, la famille de Chi Phat, Chanthol, Solène, Olivier, Chanthong, Niet, Simon, Chhaylong, Votey et sa famille, Clément, Nich, Tanguy, la maire de Khum Skuh, Hortense, Quentin, la dentiste de Saigon Dental Center, Alaric, Nina, Guillaume, Li, Tuyet, Huyn, Pascale, Laura, Tom, moine bouddhiste du Vietnam, femme de Hai Phong avant police, Vũ et sa famille, Marie, couple canadien, Byongki, Renita, Maxime, Tao, Tom, le propriétaire du domaine d’Omija, Elayis, Nq, Joël, Quentin, Romane, Hyung Kim, Andiane, Olivier, Hiroto, Delphine, Gatien, Eduard, Aure, JB, Christophe K, Pierre K, Mikki, Célia, Gaetan, Kristof, Jasmien, Tomura, Aymeric, Eva, Manon, Jules, Elouan, Prince, Pierre G, Nam Choi, le réparateur de vélo de Gangnung, Tobby, Vladimir, Tatyana, Yulia, Olga, Irina, Andreï, Artem, Alexeï, Vitaly, Clément, Claire, Pierre-Loeiz, Alexis, Guillaume, Jonathan, Malo, Thomas, Jean-Charles
Pour l’école primaire Paul Gauguin : Christine, Anne-Laure, Marie, Riwalenn, Sophie et les enfants
L’équipe santé/ maintenance : Victor, Yves, Annouck,
L’équipe Corner Bike pour leur soutien : Valentin, Victor et Felipo
Chapka assurances pour leur soutien
Bien sûr merci à nos familles et proches qui nous ont soutenus sans nous transmettre leurs inquiétudes
Et merci à vous de nous avoir suivis !

Nous allons maintenir ce site pendant 3 ans pour continuer à partager ce voyage et ces enseignements. Puis nous le supprimerons car les informations seront devenues obsolètes et qu’on ne veut pas encombrer Internet et les data-centers.
Si vous êtes journaliste, podcasteur ou juste curieux, voici un communiqué de presse diffusé à notre arrivée : CP Arrivée Betton Rayons d’Orient VF2.pdf